Archives de catégorie : carnet d’observation six pièces et plus

Vivre ensemble dans l’isolement

par Gabriel Launay, étudiant en L1, avril 2020

je suis chez mes parents ce qui me permet de profiter d’une grande
maison avec jardin et d’éviter la solitude.
Avant tout, je mange. Et pas seulement parce que j’ai plus le
temps de cuisiner.
Sur les réseaux sociaux, sont nés des groupes qui font des
propositions sur la manière dont on peut passer le temps
utilement; je me suis inscrit à tous, et, après quelques jours, je
me suis rendu compte que je n’avais pas le temps de
m’ennuyer. J’ai sorti de mes étagères Voyage au bout de la
nuit de Céline, mais je n’avais pas vraiment envie de le lire.
Je mange.
Je dors mal.
Ma vie sociale n’a jamais été si palpitante, entre skypéros,
Netflix partys et FaceTime groupés, le tout depuis mon lit. Car
oui, malgré tout l’espace que j’ai dans ma maison je passe le
plus clair de mon temps au lit, à dormir, à travailler, à penser, à
manger…
Je me demande comment ça se passe pour ceux qui ne
peuvent pas rester à la maison, parce qu’ils n’en ont pas.
Je me sens flotter dans un monde irréel quand je sors faire
des courses dans des rues vides. Je sors le moins possible de
ma maison, de ma chambre, de mon lit.
Je me demande si c’est comme ça que s’effondrent les
sociétés, si vraiment ça se passe aussi vite.
Je mange.
Je rigole, beaucoup, avec mes parents, avec mes amis en
ligne, en regardant la toile développer un humour sarcastique,
à se pendre.
Je pense à la planète qui respire à cause de la diminution de
nos activités. Je ne sais pas si j’assiste à la naissance du
monde de demain qui sera merveilleux ou misérable.
Les cours en ligne sont insupportables. Il n’y a plus de
frontière physique entre le travail et le repos. Je passe mes
journées à travailler mais à la fin d’une journée je n’ai rien
produit.
Je pense au fait qu’être enfermé dans une maison avec jardin
ou dans un immeuble populaire surpeuplé : non, ce n’est pas
la même chose. Ce n’est pas la même chose non plus que de
pouvoir travailler depuis chez soi ou de perdre son travail..
Je mange.

Gabriel Launay, photographies, avril 2020

Confinée dans une famille qui n’est pas la mienne

par Aizada Kopzhasharova, étudiante en L1, ENSA Nantes

Ce temps particulier je passe chez une famille d’accueil. Je les ai rencontrés par l’annonce.


Ils louaient une chambre et moi, je cherchais justement un logement. Mais ma présence ici ne se limite pas seulement par le rôle de locataire, j’ai également le droit de participer dans la vie quotidienne de la famille.
C’est un couple de médecins Caroline et Christian avec 4 enfants : 3 fils (Arthur, Edouard et Léopold) et une fille (Louise). Ils font tous leurs études supérieures dans les autres villes de France et d’Europe, excepté le cadet, qui va encore à l’école ici.

Au début du confinement les enfants ont commencé à rentrer. Tout le monde a pu retourner sauf la fille. Elle est restée en Italie. On est devenu nombreux. Auparavant, il y avait 4 personnes à la maison : moi, le fils cadet et les parents. Maintenant, nous étions 7 : les parents, le fils ainé avec sa copine, deux autres fils et moi.

Aizada Kopzhasharova, plan habité, avril 2020

La cohabitation au milieu des pins

par Dorian Kérivel, étudiant en L1, avril 2020

Nous sommes rentrés à la maison le vendredi soir, comme d’habitude
Mais nous savons que tout n’est pas pareil
Nous ne serons pas en cours lundi
Ni la semaine d’après
Nous ne savons pas quand tout cela reprendra au final
Quand est ce que tout cela sera fini, quand nous serons débarrassés de cette situation


Cela ne fait que commencer.


15 jours de confinement
Total. Pas de sorties, les plages fermées
Mais on sait que cela ne va pas s’arrêter là

On compte les jours, puis on s’y perd
5 semaines passées maintenant. Plus ou moins 40 jours
C’est du jamais vu, nous avons tous du mal à réaliser.


La nouvelle tombe
Nous ne retournerons pas à l’Ecole ce semestre


Quand l’état du monde l’empêche de tourner
Et que ça ne s’arrangera pas

Mince lueur d’espoir, la nature qui prend de l’espace sur l’absence de l’homme


Et nous sommes encore confinés…

Dorian Kérivel, photographies, avril 2020

Confinés à 5 dans le logement familial

par Morgane Joly, étudiante en L1, ENSA Nantes

Ils se retrouvent confinés à cinq dans le logement familial. Pour chacun d’entre eux, la situation vient bouleverser leurs habitudes individuelles et collectives.


Hervé, le père est technicien chez Naval Group et il est très compliqué pour lui de travailler à la maison car il travaille sur des applications sécurité défense non accessibles en dehors de l’entreprise. Son temps de travail a été réduit à trois jours par semaine, lors desquels il répond aux questions de ses collaborateurs par mail ou par téléphone. Le reste du temps, il effectue des travaux d’extérieur. Pour Sandrine, la mère, c’est autre chose car elle est professeure des écoles et la continuité pédagogique pour son niveau en maternelle n’est pas obligatoire. Néanmoins, elle prend plaisir à proposer des activités à ses élèves, comme faire un carnaval à distance, apprendre des chansons et cela lui permet de s’entrainer à manipuler des outils informatiques. C’est principalement elle qui s’occupe de l’intendance, des repas et du ménage des espaces collectifs, même s’ils participent tous. Morgane, l’ainée, travaille quasiment tous les jours pendant environ huit heures car le double cursus Architecte ingénieur lui demande énormément de travail personnel, elle n’a que peu de temps pour faire d’autres activités. Anouk, la deuxième de la fratrie, prépare son bac de français et la continuité pédagogique est assurée; il en ressort même que les professeurs donnent trop de travail car elle travaillait autant que Morgane en n’étant qu’en première. Pour la dernière, Lison, la continuité pédagogique est assurée, il leur est demandé de travailler quatre heures par jour mais elle n’a pas besoin de quatre heures pour faire ce qui lui est demandé alors elle s’occupe en faisant de la couture, du sport, en regardant la télévision.

Morgane Joly, dessin, avril 2020

Confinés à quatre en Sarthe

par Mathis Heurteloup, étudiant en L1, ENSA Nantes

En cette période de confinement, je vis chez mes parents à Epineu-le-chevreuil, en Sarthe. Situé en campagne, la maison est isolée de tous bruits urbains.


Le calme règne depuis le début du confinement et avec le beau temps, cela est d’autant plus agréable. Le jardin est beaucoup plus investi par toute la famille qu’en temps normal car il nous permet de nous reposer et de nous détendre. Il est très agréable d’écouter les oiseaux chanter en ces temps assez compliqués moralement.

Avant cette période de confinement, cela faisait longtemps que nous n’avions pas vécu ensemble tous les quatre. Nous avons donc dû nous réhabituer à vivre ensemble. Chaque membre de la famille s’adapte à cette situation plutôt facilement, d’autant plus que mes deux parents continuent de travailler. Le quotidien n’est donc pas si chamboulé. Nous nous entendons très bien et vivons cette situation avec sérénité. De plus, cela permet de nous laisser plus de temps pour faire des activités en famille.

Mathis Heurteloup, dessin, avril 2020

Le soleil se lève sur les marais

par Romane Héron, étudiante en L1, ENSA Nantes

Cela fait aujourd’hui quatre semaines et demi que je suis confinée avec mes deux petites sœurs et mes parents dans notre maison. Il fait beau depuis que cette période a débutée, le printemps (presque l’été) est arrivé en même temps que le coronavirus.

De chez moi, aucun bâtiment alentour pour faire de l’ombre, le jardin et la terrasse sont ensoleillés chaque jour du matin au soir, la maison aussi. Il fait bon, même chaud, et nous passons beaucoup de temps dehors. Le jardin est envahit par les pâquerettes et quelques fleurs plantées, l’herbe est bien verte et les arbres feuillus.


Nous entendons le bruit des vagues de la mer, à deux pas, à laquelle nous n’avons plus le droit d’accéder. Les oiseaux chantent toute la journée, on entend aussi beaucoup les grenouilles des mares voisines et parfois les vaches du champs juste en face. L’univers semble aujourd’hui se résoudre à cet environnement proche, je ne suis pas sortie de mon village ostréicole depuis un mois. Je vois le soleil se coucher à travers les arbres depuis la cuisine au lieu de le regarder depuis la plage entourée de mes amis. Chaque jour il se lève sur les marais de l’autre coté, vers 7h30, et les grandes baies vitrées du salon inondent la maison d’une couleur rose orangée.

Romane Heron, dessin, avril 2020

Le retour des enfants étudiants

par Camille Hemery, étudiante en L1, ENSA Nantes

L’habitat est un lieu vivant par définition et habité par différentes personnes de tout âge. Cet habitat est une maison située dans la ville de La Baule-Escoublac. Habitée depuis 20 ans, cette maison a été construite par un ménage de quatre personnes, un couple, Marie-Laure et Franck et ses deux enfants âgés de 18 et 21 ans, Camille et Maxime.

Les pratiques et le mode de vie au sein de la maison a légèrement changé ces dernières années car les deux enfants sont partis l’un après l’autre en études supérieures, Maxime réside en semaine à Rennes, tandis que Camille est à Nantes. Ainsi, le weekend, l’organisation de la maison est quelque peu chamboulée par rapport à en semaine, Camille rentre tous les week-ends tandis que Maxime revient une semaine sur trois environ. Durant cette situation exceptionnelle qu’est le confinement, les quatre habitants de cette maison se retrouve à cohabiter, situation quelque peu exceptionnelle car l’habitude d’être ensemble tout le temps avait été perdue. Ainsi, le temps de cette période, les quatre membres du ménage ont dû s’adapter et s’organiser en fonction des uns et des autres pour continuer de vivre ensemble tout en continuant de travailler chacun de son côté.

Camille Hemery, plan habité du T6, avril 2020